Le peintre, dessinateur, graveur et sculpteur bâlois Albert Müller (1897–1926) est considéré comme l’un des principaux représentants de l’expressionnisme suisse. Il a bénéficié d’une première formation artistique dans un atelier de peinture sur verre ainsi qu’à l’école des arts et métiers de sa ville natale. Fortement impressionné par Cuno Amiet, il s’engage bientôt, à l’aide de surfaces de couleur lumineuses, contre la peinture des artistes locaux bien établis, fortement dominée par des tons sombres. C’est en 1919 que l’attention d’un public plus large a été attirée pour la première fois sur ses travaux.
Même après son installation au Tessin, deux ans plus tard, Müller continue d’entretenir un lien étroit avec la vie culturelle de Bâle. La confrontation avec l’avant-garde est source d’un développement artistique intense. Ainsi réagit-il à des impulsions émanant de Louis Moilliet et d’Edvard Munch, jusqu’à ce que la rencontre avec l’œuvre de Ernst Ludwig Kirchner et, finalement, l’amitié scellée avec cet artiste ne constituent le point de départ du développement de son propre langage plastique.
Tableaux de paysages et variations sur le thème de la figure humaine, pour lesquelles sa propre famille servait régulièrement de modèle, se succèdent ensuite à un rythme rapide. Il réalise de nombreuses esquisses, enlevées d’un trait énergique, des aquarelles aux tons puissants et des peintures composées de surfaces de couleur contrastées, juxtaposées avec hardiesse. Le plus souvent, Müller colore aussi ses sculptures en bois, travaillées intentionnellement de manière très brute et, par là, d’autant plus expressive. L’estampe joue un rôle important dans son œuvre, qu’il s’agisse de gravures sur bois aux puissants effets de contraste ou de gravures à l'eau-forte, dans lesquelles il exploite fréquemment, en utilisant l’aquatinte et la morsure de l’acide appliqué au pinceau, la palette complète du répertoire des nuances de gris.
Müller, Hermann Scherer et Paul Camenisch ont fondé au cours de la nuit de la Saint-Sylvestre 1924 la société d’artistes « Rot-Blau » (rouge-bleu), dans l’objectif d’un engagement en faveur de meilleures possibilités d’exposition, ainsi que de l’obtention de commandes publiques. Bien qu’il n’ait fait partie du groupe que peu de temps, Müller n’en a pas moins contribué de manière décisive, dans cette fonction, à l’instauration d’une audience favorable à l’art moderne dans sa ville d’origine.